Un policier haïtien tué en service, trois autres blessés lors d’une opération antigang

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En deux jours seulement, la Police nationale haïtienne a enregistré quatre victimes. L’agente Nathanielle Médjine Michel a été tuée alors qu’elle se rendait à son travail à Delmas, une banlieue au nord-est de Port-au-Prince, et trois autres personnes non identifiées ont été blessées dans un autre incident impliquant des échanges de coups de feu entre la police et des membres de gangs. Michel est le deuxième policier assassiné en août, ce qui porte à 22 le nombre total de policiers tués par balle cette année.

PORT-AU-PRINCE — La Police nationale d’Haïti (PNH) pleure l’assassinat de l’agente Nathanielle Médjine Michel, survenu mercredi à Port-au-Prince. Cette perte tragique s’ajoute à la liste croissante des policiers haïtiens tués par balles cette année. Les attaques contre les forces de l’ordre se poursuivent alors que les autorités promettent des mesures contre les gangs qui étendent quotidiennement leur contrôle sur de nouveaux territoires.

Cet incident s’inscrit dans le cadre d’une série de violences plus larges affectant la PNH, qui manque de ressources et peine à gérer l’escalade de la violence des gangs dans le pays.

Le Syndicat de la Police Nationale d’Haïti (SYNAPOHA) a confirmé le meurtre de Michel dans un message publié sur X. L’organisation rapporte que l’agente, affectée au commissariat de Delmas 75, a été tuée alors qu’elle se rendait à son travail.

Le rapport de scène de crime du syndicat a relevé 13 impacts de balles sur les vitres de la voiture du policier. Michel faisait partie de la 28e cohorte de la police haïtienne.

La policière Nathanielle Médjine Michel a été assassinée le 28 août 2024. Crédit photo : SYNAPOHA

Dans un autre incident survenu mardi, la PNH a également enregistré trois blessés dans ses rangs. Le haut commandement de l’institution chargée du maintien de l’ordre a confirmé que trois officiers, faisant partie de l’unité SWAT, ont été blessés par balles lors d’une opération antigang dans les quartiers de Bel-Air et Solino, près du centre de Port-au-Prince.

Dans un message publié sur Xl’institution policière a déclaré que les trois policiers étaient dans un état stable et qu’ils recevaient les soins médicaux nécessaires pour leurs blessures.

Malgré les changements intervenus au sein de la Police nationale haïtienne, l’institution continue de faire face à des défis importants, avec 22 officiers assassinés rien qu’en 2024. Cette statistique inquiétante met en évidence l’escalade de la crise sécuritaire dans le pays, où la violence des gangs reste endémique.

« J’encourage le commandement à continuer d’avancer. Au nom de la population, je remercie les policiers pour leur sacrifice et je les assure que le gouvernement ne les abandonnera pas et ne reculera pas. »

Garry Conille, Premier Ministre d’Haïti

La police haïtienne est soumise à une pression énorme, avec des attaques continues de gangs qui ont étendu leur contrôle sur de vastes portions de Port-au-Prince et d’autres zones. Les efforts pour renforcer les forces de police, notamment le soutien international et le déploiement de 400 policiers kenyans, n’ont pas encore permis d’améliorer sensiblement la sécurité.

Dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de Michel, la police a interpellé la sœur de la victime, Nathalie Michel, et son beau-frère, le policier Jean Andersen Cantave, affecté à l’Unité départementale de maintien de l’ordre (UDMO). Selon la PNH, ces individus seraient en lien avec le crime. Un conflit familial serait à l’origine du meurtre du policier.

La semaine dernière, un autre officier de la PNH, James Dorsainvila été tué dans le quartier de Solino lors d’une attaque des gangs de Bel-Air dirigés par Kempès Sanon. Ces gangs sont déterminés à contrôler cette zone stratégique pour étendre leur influence sur des quartiers tels que Nazon, Carrefour Aéroport, Christ-Roi, Lalue, Poupelard et Delmas 24.

Avec ces deux meurtres, le nombre total de policiers tués en Haïti en service ou non au cours des derniers mois ne cesse d’augmenter. De juin 2023 à juin 2024, un total de 36 policiers ont été assassinés, selon le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH).

Aucune évaluation n’a encore été faite sur l’opération conjointe ciblée PNH-MSS

Suite à la livraison de nouveaux véhicules blindés et d’équipements à la PNH et à la mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS) dirigée par le Kenya, une opération conjointe impliquant des officiers haïtiens et kenyans a été lancée à Bel-Air et Solino. Outre les informations limitées sur les trois policiers blessés, aucun détail n’a été divulgué concernant le nombre de victimes du côté des gangs, le cas échéant, ou la quantité d’articles, tels que des armes et des munitions, saisis.

Dans un déclaration Sur son site, la force multinationale a déclaré mardi que l’opération conjointe avait été soigneusement planifiée. Les responsables ont assuré que « cette opération n’est que le début » (et) « les gangs ne doivent pas s’attendre à ce que la pression diminue à moins qu’ils ne déposent les armes ».

« Comme il s’agissait de la première opération ciblée de grande envergure, les habitants ont été informés des interventions et les gangsters qui ont tenté de résister ont fui à travers les rues étroites », a indiqué le MSS sans préciser si des bandits ont été capturés ou tués.

Les responsables haïtiens et kenyans ont promis que des opérations de sécurité ultérieures seraient menées et maintenues. « Le gouvernement haïtien s’est engagé à déployer toutes ses ressources pour soutenir les opérations conjointes », peut-on lire dans le communiqué du MSS. « Le Premier ministre, le directeur général de la PNH et le commandant de la force du MSS, tout en surveillant de près les opérations en cours, ont réitéré leur engagement à assurer le retour de la paix et de la normalité en Haïti. »

Le Premier ministre Garry Conille, qui a rendu visite aux trois officiers blessés du SWAT, était présent mardi au centre d’opérations d’urgence de la police. Lors d’un échange avec le DG de la PNH, Rameau Normil, le commandant par intérim des Forces armées d’Haïti (FADH), Derby Guerrier, et le chef du MSS, Godfrey Otunge, Conille a discuté des résultats et évalué les opérations sur le terrain, notamment celles de Bel-Air.

« J’encourage le commandement à continuer d’avancer », a déclaré le Premier ministre lors de son discours. X « Au nom de la population, je remercie les policiers pour leur sacrifice et je les assure que le gouvernement ne les abandonnera pas et ne reculera pas. »

Manifestations contre la violence des gangs

Alors que les autorités renouvellent leurs promesses de reconquérir les territoires contrôlés par les gangs, la situation reste désastreuse pour les habitants de Fond-Parisien et de Ganthier, près de Malpasse, à la frontière avec la République dominicaine. Contournant la PNH et les forces kenyanes, le gang 400 Mawozo continue de terroriser ces zones. Des bandits de ce groupe ont récemment attaqué des locaux de la police, incendiant des postes de police et des véhicules blindés, et pris le contrôle du bâtiment des douanes de Ganthier.

La situation est similaire dans certaines parties de la région de l’Artibonite, notamment à Gros-Morne. Les gangs Kokorat San Ras et Gran Grif continuent de faire régner la terreur sur les communautés de cette région en l’absence de forces de l’ordre efficaces.

La dernière attaque dans la campagne de Gros-Morne par Kokorat San Ras au cours du week-end dernier a entraîné 10 morts, de nombreuses maisons et fermes incendiées et des familles fuyant pour se mettre en sécurité. Il s’agit du deuxième bain de sang perpétré par ce gang dans la région en seulement deux mois.

À la mi-juin, une autre attaque dans deux localités rurales de Terre-Neuve et de Gros-Morne a laissé 10 morts et au moins 20 maisons incendiées.

Lassés de la violence, des centaines d’habitants sont descendus dans la rue mercredi pour exiger la fin des attaques contre Ganthier, comme l’a rapporté la presse locale. Vêtus principalement de t-shirts blancs et brandissant des pancartes sur lesquelles étaient inscrits divers slogans en créole, les manifestants ont appelé l’Etat haïtien à combattre le banditisme qui ravage leurs communautés autrefois paisibles.

Une situation similaire s’est produite mercredi dans le département de l’Artibonite. Plusieurs habitants des Gonaïves ont de nouveau manifesté, exigeant la fin des violences des gangs qui terrorisent la région. Les habitants sont confrontés aux attaques des gangs Kokorat San Ras et Gran Grif dans leurs quartiers et sur les routes.

La prise de Ganthier fait suite à plusieurs attaques menées par les gangs Grande Ravine et Fontamara sur Carrefour et Gressier, deux communes du sud-ouest de Port-au-Prince. Ces gangs ont détruit des commissariats de police, pillé, brûlé des biens publics et privés et commis des actes de meurtre, d’enlèvement et de déplacement forcé de personnes.

Un récent rapport du RNDDH révèle qu’au moins 66 personnes, dont des policiers, ont été tuées ou ont disparu au cours des deux premiers trimestres de 2024 dans ces deux communes.

« Les interventions de l’État dans la région restent insignifiantes par rapport à la terreur imposée par les bandes armées », a déclaré le RNDDH. « De janvier à juillet 2024, la situation sécuritaire à Carrefour et Gressier a complètement dégénéré, marquée par la présence de bandits armés dans les rues, les marchés, les clubs sportifs et les gares routières. »

À suivre