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La récente interdiction de vol sur Haïti imposée par la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis, présentée comme une mesure de sécurité, est critiquée comme une décision politique mal conçue qui exacerbe les défis économiques, sociaux et humanitaires du pays. Les auteurs plaident en faveur de solutions alternatives pour assurer la sécurité sans isoler Haïti.
Par Dr Guerda Nicolas, Wolf Pamphile et Santra Denis
Dans un monde qui prétend défendre les droits de l’homme, l’interdiction récente par la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis des vols à destination et en provenance d’Haïti jette une ombre inquiétante sur l’idée même de solidarité internationale. Bien que présentée comme une réponse à des problèmes de sécurité, cette action a eu des conséquences considérables et dévastatrices sur toute une nation. Pour le peuple haïtien, cette interdiction à l’échelle nationale, au lieu d’une restriction localisée, représente plus qu’une perturbation du transport aérien ; c’est une crise qui approfondit leur isolement, aggrave les difficultés économiques et place toute une population en proie à l’incertitude. Une telle mesure, dans ses conséquences, frise ce qui ne peut être décrit que comme des décisions politiques peu judicieuses et inintelligentes et une grave injustice en matière de droits de l’homme.
En janvier 2023, des gangs de cartels mexicains ont attaqué un vol à destination de Mexico à l’aéroport de Culiacán en représailles à l’arrestation du fils d’El Chapo Guzman, Ovidio Guzman. Selon les autorités mexicaines, elles « ont détecté un impact de balle dans le fuselage d’un avion Embraer E190 qui était prêt à effectuer le vol AM165 sur la route Culiacán-Mexico. Le vol a été annulé pour des raisons de sécurité. Bien que cet incident reflète ce qui s’est produit récemment à Port-au-Prince, les États-Unis n’ont pas imposé d’interdiction à l’échelle nationale au Mexique, ni même à Culiacán.
En attendant une amélioration, les États-Unis ont interdit les vols américains vers Haïti pendant un mois et ont émis une alerte de sécurité conseillant aux citoyens de ne pas voyager dans le pays.
Comprendre les outils politiques de la FAA met en évidence la gravité de cette décision. La FAA dispose de deux outils principaux pour atténuer les risques aériens dans l’espace aérien étranger : les interdictions et les restrictions. Une interdiction est une interdiction totale ; Lorsque la FAA émet une interdiction, elle interdit aux avions et aux pilotes enregistrés aux États-Unis de voler vers, depuis ou au-dessus de certaines régions ou pays. Les interdictions sont généralement réservées aux zones confrontées à des risques de sécurité extrêmes, comme les zones de guerre active ou les régions présentant des menaces élevées pour les avions. En revanche, une restriction permet un accès limité plutôt qu’une interdiction totale. Les restrictions peuvent impliquer des limitations d’altitude, des itinéraires spécifiques ou d’autres conditions permettant aux vols de se poursuivre en toute sécurité dans des zones sensibles. Une décision politique centrée sur l’humain envisagerait la construction du deuxième aéroport international d’Haïti à Cap-Haïtien, qui n’est pas touché par l’instabilité et continue d’être une source de tourisme et une porte d’entrée pour l’aide humanitaire.
Malgré son instabilité politique, Haïti n’est pas dans une zone de guerre active. Dans les pays en guerre active, la FAA n’a pas toujours interdit les vols comme première réaction immédiate. Le choix d’une interdiction totale des vols plutôt que de restrictions plus mesurées est discutable et profondément préjudiciable. Une restriction, assortie de conditions telles que des itinéraires ou des altitudes spécifiés, pourrait résoudre tout problème de sécurité identifié tout en maintenant les liaisons de voyage essentielles pour le peuple haïtien. En imposant une interdiction au lieu d’une restriction, la FAA a complètement coupé Haïti, bloquant les flux de biens essentiels, de personnes et d’aide médicale.
Une coalition de 55 parents adoptifs américains continue d’appeler à l’action en faveur du départ des enfants haïtiens dans un contexte de violence endémique des gangs en Haïti
Le moment de l’interdiction ne pourrait pas être pire. Haïti est confronté à de profondes crises sur plusieurs fronts : instabilité politique, catastrophes naturelles, problèmes de santé et pauvreté généralisée. Cette action de la FAA ferme effectivement la porte à un soutien économique vital, à une aide médicale et à des efforts de réunification familiale. L’aide humanitaire et les envois de fonds de la diaspora haïtienne, qui représentent une part importante de l’économie du pays, ont considérablement ralenti, laissant les communautés dans des situations désastreuses, sans les ressources dont elles ont désespérément besoin. L’interdiction à l’échelle nationale met essentiellement la main sur une population qui lutte déjà pour sa survie. Ce faisant, cela contredit les principes mêmes de dignité humaine et de solidarité défendus par les organisations internationales.
Les conséquences humanitaires ne peuvent être surestimées. Le système de santé haïtien est déjà soumis à une pression immense, avec des infrastructures et des fournitures limitées. L’interdiction de vol perturbe la fourniture de ressources médicales essentielles, laissant d’innombrables patients et prestataires de soins bloqués. Cela met également en péril le travail d’innombrables organisations humanitaires dont le personnel dépend de vols directs pour atteindre ceux qui en ont besoin. Bloquer cette bouée de sauvetage équivaut à refuser au peuple haïtien le droit à la santé, à la sécurité et au bien-être de base.
Pensez au sort des propriétaires de petites entreprises qui dépendent des marchandises transportées par avion en provenance des États-Unis ou aux étudiants et professionnels haïtiens qui ont besoin de flexibilité de voyage pour maintenir leurs études, leur carrière et leurs liens familiaux. L’interdiction de la FAA a privé ces individus de la possibilité d’accéder à des opportunités, qui sont souvent des bouées de sauvetage pour sortir de la pauvreté. Ces particuliers et entreprises sont désormais contraints de faire des détours complexes et coûteux, souvent via d’autres pays, ce qui alourdit leurs dépenses et exacerbe la pression financière sur les ménages vulnérables. Il ne s’agit pas simplement d’un inconvénient mais d’un obstacle systémique au développement économique qui fera reculer Haïti pendant des années.
Cette interdiction de vol de la FAA a révélé un dangereux précédent, démontrant comment des nations puissantes peuvent isoler et étouffer économiquement des pays qui
Le Dr Guerda Nicolas est professeur d’études pédagogiques et psychologiques à l’Université de Miami et co-fondateur d’Ayiti Community Trust. Elle est profondément engagée dans la défense de la santé mentale et le développement communautaire auprès des populations haïtiennes et caribéennes.
Wolf Pamphile est le fondateur et directeur exécutif de Haiti Policy House, un institut de recherche basé à Washington et axé sur les questions géopolitiques spécifiques à Haïti.
Santra Denis est la présidente et fondatrice d’Avanse Ansanm et la directrice exécutive du Miami Workers Center. Elle est une millénaire haïtiano-américaine et une amoureuse de tous. La mission de sa vie est de démanteler les systèmes d’oppression pour la libération de tous.