Haïti – ONU : Situation sécuritaire très fragile et situation humanitaire désastreuse…

Share on facebook
Share on twitter
Share on linkedin
Share on email


Haïti – ONU : Situation sécuritaire très fragile et situation humanitaire désastreuse…
23/10/2024 10:14:40

Haïti - ONU : Situation sécuritaire très fragile et situation humanitaire désastreuse...

Le mardi 22 octobre 2024, Mme Maria Isabel Salvador, Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti et Chef du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) a présenté au Conseil de sécurité de l’ONU un point sur la situation en Haïti.

Déclarations de Maria Isabel Salvador :

« (…) Depuis mon dernier exposé devant ce Conseil en juillet, la situation en Haïti s’est malheureusement détériorée. Il y a plus de 700 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays. https://www.haitilibre.com/article-43364-haiti-flash-plus-de-700-000-haitiens-ont-fui-leurs-foyers.html, ce qui représente une augmentation de 22 pour cent au cours des 3 derniers mois. Le processus politique, malgré les premiers progrès dont j’ai fait état en juillet, se trouve désormais confronté à des défis importants, transformant l’espoir en une profonde préoccupation. La situation sécuritaire reste extrêmement fragileavec de nouveaux pics de violence aiguë. Les Haïtiens continuent de souffrir à travers le pays alors que les activités des gangs criminels s’intensifient et s’étendent au-delà de Port-au-Prince, semant la terreur et la peur et submergeant l’appareil de sécurité nationale. La situation humanitaire est encore plus désastreuse.

Le 3 octobre, une horrible et brutale attaque de gangs contre la petite ville de Port Sondé, dans le département de l’Artibonite, a fait 115 morts parmi les civils et des dizaines de blessés. https://www.haitilibre.com/article-43385-haiti-flash-le-bilan-partiel-de-morts-du-massacre-pont-sonde-s’élève-maintenant-à-115.html. L’attaque a mis en évidence l’insécurité dans laquelle les Haïtiens sont contraints de vivre et a encore exacerbé la crise humanitaire. Cet horrible événement, qui a choqué le pays, a poussé des milliers d’habitants à fuir leurs foyers pour chercher refuge dans d’autres régions et constitue un autre rappel de l’insécurité croissante qui continue de faire des ravages dans la vie quotidienne des Haïtiens.

Des gangs attaquent également en mer. De petits bateaux transportant des civils de la capitale vers d’autres régions d’Haïti ont été attaqués. Le personnel des sociétés de fret international a été kidnappé https://www.icihaiti.com/article-43289-icihaiti-flash-mesures-de-securite-au-port-de-port-au-prince.html obligeant les compagnies de fret international à suspendre leurs services vers Haïti. Au cours des cinq derniers jours, diverses zones de Port-au-Prince comme Solino, Nazon, Bas Delmas, Cité Militaire, Drouillard, Tabarre, Croix-de Bouquets, Cité Doudoune et Arcahaie dans le département de l’Ouest, ainsi que L’Estère dans le département de l’Ouest. le département de l’Artibonite, ont été régulièrement attaqués par différents groupes de gangs de l’alliance Viv Ensemble.

Madame la Présidente,

Je voudrais souligner l’impact dévastateur de ces violences sur la population haïtienne. Les femmes, les hommes et surtout les enfants sont les plus touchés par les atrocités des gangs, qui comprennent des meurtres, des enlèvements et des violences sexuelles d’une brutalité sans précédent dans les régions touchées. Les gangs utilisent systématiquement la violence sexuelle comme arme de terreur et d’assujettissement, infligeant des souffrances indicibles aux femmes et aux filles, ainsi qu’à d’autres groupes vulnérables. Le peuple haïtien continue de souffrir dans des conditions de vie désastreuses, avec un accès de plus en plus limité aux services essentiels, en particulier dans les zones où des milliers de personnes ont été déplacées fuyant la terreur.

Depuis leur premier déploiement en juin, les contingents kenyans de la mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS) ont été rejoints par leurs homologues des Bahamas, du Belize et de la Jamaïque. Environ 430 personnes sont déployées et leur présence est une évolution bienvenue. Pourtant, c’est loin d’être suffisant. L’annonce faite par le président Ruto du Kenya sur le déploiement, dans les semaines à venir, d’un contingent supplémentaire pour compléter les forces déjà déployées est bien accueillie.

Malgré certaines promesses de don au Fonds fiduciaire, la mission MSS reste gravement sous-financée, ce qui pourrait avoir un impact sur son déploiement et l’empêcher de mener à bien ses tâches de soutien à la Police nationale haïtienne.

Madame la Présidente,

Je voudrais profiter de cette occasion pour exprimer ma gratitude aux membres de ce Conseil pour le renouvellement du mandat du BINUH https://www.icihaiti.com/article-42756-icihaiti-un-binuh-mandat-prolongé-à-l’unanimité-pour-un-an.html en juillet. Ce mandat renouvelé fournit le cadre nécessaire au BINUH pour poursuivre son travail essentiel de soutien à Haïti pendant cette période de transition.

En réponse à la demande du Conseil, nous avons activement élaboré une stratégie globale pour soutenir le processus politique dirigé par Haïti. Cette stratégie intègre la nécessité d’un dialogue national inclusif renforcé, d’un soutien renforcé aux réformes électorales et constitutionnelles et d’une sécurité publique accrue grâce à une coopération renforcée avec la Police nationale haïtienne (PNH) et le MSS. Je voudrais également profiter de cette occasion pour remercier cet honorable Conseil pour son soutien décisif aux résolutions concernant Haïti, notamment sur le renouvellement du régime de sanctions et du mandat du MSS.

Excellences,

Tout au long de la période considérée, les progrès limités réalisés par les autorités nationales dans la mise en œuvre des dispositions de gouvernance transitoire convenues ont été sérieusement éclipsées par les divergences croissantes au sein de l’exécutif à deux têtes.

Le 7 octobre, M. Leslie Voltaire a succédé à M. Edgard Leblanc à la présidence du Conseil présidentiel de transition, dans un ordre modifié de la présidence pro tempore du TPC. https://www.haitilibre.com/article-43354-haiti-actualite-zapping.html au milieu d’allégations de corruption contre trois de ses membres https://www.haitilibre.com/article-43336-haiti-flash-l’ulcc-dans-l’affaire-bnc-demandes-des-actions-criminelles-contre-3-rapport-des-conseillers-de-transition.html . Les tensions entre le TPC et le gouvernement se sont accrues. En conséquence, la frustration du public face aux dynamiques conflictuelles affectant le travail des autorités de transition s’est accrue et érode la confiance dans le processus politique actuel.

Dans l’accomplissement de son mandat, le BINUH s’efforce de renforcer la collaboration au sein de l’exécutif à deux têtes, les exhortant à mettre de côté les divergences et à se concentrer sur la lutte contre l’insécurité, les réformes de la gouvernance et les préparatifs électoraux. L’exécutif à deux têtes doit agir dans l’unité et avec un plus grand sens des responsabilités pour relever les défis les plus urgents du pays.

Dans ce contexte, les efforts conjoints des autorités de transition, qu’ils concernent les domaines sécuritaire, politique ou de bonne gouvernance, doivent impérativement s’accompagner d’une lutte résolue contre l’impunité et la corruption, ainsi que d’un renforcement de l’État de droit. Le renforcement des institutions judiciaires haïtiennes, et leur capacité à travailler en toute indépendance, pour que justice soit rendue, restent fondamentaux pour restaurer et consolider la confiance des citoyens dans leurs dirigeants et l’administration publique.

Le Conseil présidentiel de transition a mandaté une conférence nationale, un mécanisme multipartite inclusif, pour formuler des recommandations sur les réformes constitutionnelles. https://www.haitilibre.com/article-43053-haiti-politique-installation-des-membres-du-comite-directeur-de-la-conference-nationale.html le développement d’un nouveau contrat social et la redéfinition des relations État-société, y compris des réformes du système judiciaire et de l’organisation des institutions étatiques. Il est urgent de responsabiliser, de permettre et de soutenir le travail de la Conférence nationale, notamment pour éviter des retards dans la mise en œuvre de son mandat qui pourraient avoir un impact négatif sur le calendrier électoral.

La nomination et l’installation le 18 octobre de sept des neuf membres du Conseil Électoral Provisoire (CEP) dans leurs fonctions https://www.haitilibre.com/article-43449-haiti-elections-assermentation-des-membres-du-cep-video-du-discours-de-voltaire.html est un premier pas dans la bonne direction. Néanmoins, la création complète du Conseil électoral provisoire est requise de toute urgence. J’exhorte les secteurs restants à nommer leurs représentants dans les plus brefs délais, afin de permettre l’achèvement du Conseil électoral provisoire. La participation active de tous les secteurs est cruciale et permettra aux préparatifs électoraux d’avancer à plein régime, y compris en ce qui concerne la feuille de route, comme l’a demandé ce Conseil. Les secteurs des femmes et des droits humains ne peuvent être absents de ce processus. De nouveaux retards auront nécessairement un impact sur le calendrier électoral convenu.

Excellences,

La situation humanitaire reste extrêmement désastreuse. L’insécurité alimentaire touche près de la moitié de la population et le contrôle des gangs sur les principales routes d’accès a gravement perturbé la distribution des biens et services essentiels. En conséquence, les prix ont augmenté et de nombreuses communautés sont au bord de l’effondrement en raison des pénuries alimentaires et de la violence continue qui a rendu improductives de vastes étendues de terres agricoles.

Cette combinaison d’insécurité et d’instabilité économique a conduit à des déplacements massifs, des milliers de personnes ayant fui leurs foyers à la recherche de sécurité. L’Organisation internationale pour les migrations a signalé une augmentation significative du nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays, aggravant une situation humanitaire déjà fragile. Dans tout le pays, plus de 700 000 personnes sont aujourd’hui déplacées à l’intérieur du pays, dont plus de la moitié sont des enfants. Ces chiffres représentent une augmentation de 22 pour cent au cours des trois derniers mois.

Seulement 20 pour cent des établissements de santé à Port-au-Prince sont opérationnels, et 40 pour cent à l’échelle nationale. 45 pour cent de la population n’a pas accès à l’eau potable. L’accès à l’éducation est gravement entravé, avec 1 000 écoles fermées en raison de l’insécurité.

Madame la Présidente, Distingués Membres, Excellences, Collègues, Mesdames et Messieurs,

Les nouvelles modalités de gouvernance de la transition, le déploiement attendu du MSS et la perspective d’élections avant fin 2025 offraient une lueur d’espoir. Néanmoins, le temps passe. Pour garantir des élections inclusives, crédibles et participatives, y compris un référendum et des élections générales, un engagement ferme de toutes les parties prenantes à revitaliser le consensus national et à placer les intérêts nationaux avant les leurs est essentiel. Ce n’est que grâce à un dévouement sans faille à la mise en œuvre des engagements convenus en mars 2024 que les élections pourront véritablement contribuer au rétablissement de la gouvernance et de la stabilité en Haïti. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour rétablir la confiance du public et garantir la légitimité du processus politique. Le soutien à l’appareil de sécurité haïtien et le financement du MSS sont fondamentaux.

La voie à suivre pour Haïti est semée d’embûches. Nous exhortons donc les acteurs politiques à éviter tout risque de faire dérailler le processus politique et appelons la communauté internationale à maintenir son soutien indéfectible au peuple haïtien dans sa quête de stabilité. Le BINUH, en coopération avec ses partenaires, continuera à fournir le soutien stratégique nécessaire pour traverser cette période critique.

Des progrès sur le plan politique, une sécurité améliorée et des mesures ciblées contre tous les fauteurs de troubles qui continuent de menacer le chemin parcouru par Haïti vers la restauration des institutions démocratiques resteront essentiels à l’avenir.

La résilience et la force du peuple haïtien sont extraordinaires et méritent notre soutien indéfectible sur tous les fronts. Nous devons rester déterminés à aider Haïti sur la voie de la sécurité, de la stabilité et de la prospérité.

Merci.”

Voir aussi :

https://www.haitilibre.com/article-43449-haiti-elections-assermentation-des-membres-du-cep-video-du-discours-de-voltaire.html

https://www.haitilibre.com/article-43385-haiti-flash-le-bilan-partiel-de-morts-du-pont-sonde-le-massacre-s’élève-maintenant-à-115.html

https://www.haitilibre.com/article-43364-haiti-flash-plus-de-700-000-haitiens-ont-fui-leurs-foyers.html

https://www.haitilibre.com/article-43354-haiti-actualite-zapping.html

https://www.haitilibre.com/article-43336-haiti-flash-l’ulcc-dans-l’affaire-bnc-demandes-des-actions-criminelles-contre-3-rapport-des-conseillers-de-transition.html

https://www.icihaiti.com/article-43289-icihaiti-flash-mesures-de-securite-au-port-de-port-au-prince.html

https://www.haitilibre.com/article-43053-haiti-politique-installation-des-membres-du-comite-directeur-de-la-conference-nationale.html

https://www.icihaiti.com/article-42756-icihaiti-un-binuh-mandat-prolongé-à-l’unanimité-pour-un-an.html

https://www.haitilibre.com/article-41523-haiti-onu-declaration-au-conseil-de-securite-par-maria-isabel-salvador-chef-de-binuh.html

HL/HaïtiLibre

À suivre