Marché de Noël de Ouanaminthe : les vendeurs alimentent la résilience

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Les artisans et vendeurs haïtiens de Ouanaminthe comptent sur Noël pour perpétuer les traditions et soutenir l’économie locale.

OUANAMINTHE, Haïti — Sur un tronçon de route non pavée juste à côté de la place de la ville de Ouanaminthe, au milieu des marchés animés, Judeline Jean-Louis, une vendeuse de jouets, arrange avec amour un assortiment de jouets colorés, des poupées aux voitures miniatures. Comme Noël ou Noël aux approches créoles, la paisible ville de Ouanaminthe, au nord-est, se transforme en un centre dynamique de couleurs et de commerce. Ici, la période de Noël est plus qu’une occasion festive : c’est une bouée de sauvetage essentielle pour les familles et les entreprises en difficulté.

Dans un contexte d’inflation croissante, d’instabilité des transports et de fréquentes coupures de courant, les vendeurs comme le vendeur de jouets Jean-Louis et les artisans comme le fabricant de liqueurs Rodacheca Marcellus dépendent de la ruée des fêtes pour subvenir à leurs besoins. Ces traditions locales, des marchés animés aux messes de minuit, incarnent un esprit de joie et de solidarité fragile mais résilient, offrant un aperçu de la manière dont les Haïtiens préservent leur culture et leur communauté malgré les défis économiques et sociaux actuels.

«Le véritable esprit de Noël consiste à donner, à partager ce que vous avez, à aimer vos amis, vos proches et même vos ennemis, à créer des souvenirs inoubliables avec vos proches et vos amis», explique Rose Marth Farlie Maurice, une jeune étudiante de Fort- Liberté, qui prépare Noël avec impatience dans sa maison familiale.

Dans les grandes villes comme Ouanaminthe et à Fort-Liberté et dans tout Haïti, où l’inflation, l’affaiblissement de la gourde et les systèmes de transport défaillants mettent à l’épreuve la survie quotidienne, la période des fêtes offre un espoir rare. Les vendeurs, défiant les difficultés économiques et les couvre-feux imposés par le gouvernement, voient dans la fin de l’année une opportunité de récupérer leurs revenus perdus. Les rues s’animent avec les décorations festives, le crépitement des pétards et les appels des vendeurs ambulants, transformant Noël plus qu’une célébration : c’est une bouée de sauvetage essentielle pour les familles et l’économie locale.

Une saison de survie et de célébration : la résilience des artisans locaux

Des jouets étaient exposés au marché de Ouanaminthe le 15 décembre 2024. Photo d’Edxon Francisque pour The Haitian Times.

Au coin de la place, Jean-Louis, 34 ans, mère de quatre enfants, accueille les enfants et les familles sur son petit stand. Son stand regorge d’objets colorés, des jouets aux ornements, chaque article soigneusement placé.

«C’est la période la plus merveilleuse de l’année!» dit-elle. « J’aime voir les yeux des enfants s’illuminer lorsqu’ils choisissent leurs jouets. » Pour elle, chaque vente apporte plus que du profit : elle donne un sentiment d’espoir pour l’avenir de ses enfants. Les fonds provenant de ses ventes aideront à financer leur scolarité et à garder leur Nwèl brillant.

Elle a perfectionné sa stratégie pour cette période de l’année. Elle a mis de petites étiquettes de prix avec des offres alléchantes qui encouragent les enfants, armés de quelques gourdes, à tenter leur chance pour gagner un jouet plus cher. Cette formule occupe son stand de jouets, surtout pendant la ruée vers les achats des Fêtes. Alors que les parents cherchent à faire plaisir à leurs enfants, Jean-Louis sait que c’est l’occasion pour elle de profiter au maximum de la saison.

Tandis que les vendeurs de jouets comme celui de Jean-Louis alimentent l’esprit des enfants, les artisans contribuent à l’esprit de joie et à l’économie d’une manière qui va au-delà de la simple vente.

Rodacheca tient dans ses mains deux verres de liqueur, l’un contenant de la cannelle, également connue sous le nom de canelle, et l’autre rempli de gombo, appelé kalalou. Elle crée ces liqueurs à partir d’ingrédients simples. Ces photos ont été prises par Edxon Francisque le 17 décembre 2024 pour The Haitian Times.

Parmi ces artisans se trouve Rodacheca Marcellus, une jeune femme déterminée de 20 ans qui a transformé sa passion pour l’alcool en entreprise. Ses créations sont élaborées à partir de fruits et légumes locaux, mettant en valeur le riche patrimoine culinaire de la région.

« Nous fabriquons différents types de liqueurs : la grenadine, le gombo connu sous le nom de kaloufruit de la passion ou grenadia, et plus encore. », explique-t-elle.

Comme beaucoup d’autres, Marcellus voit Noël comme une opportunité d’augmenter ses ventes. « C’est le moment d’augmenter mes revenus, de proposer des produits à l’image des fêtes et d’offrir à ma famille un avenir meilleur », dit-elle.

« Les vacances sont notre période la plus occupée. Les gens veulent quelque chose de spécial à partager avec leur famille et leurs amis », dit-elle. Les liqueurs de Marcellus nourrissent non seulement sa famille, mais préservent les saveurs traditionnelles propres aux célébrations haïtiennes.

Les sons, les odeurs et l’esprit de Noël

Une discothèque s’illumine de guirlandes pour apporter l’esprit de Noël à ses clients. Photo prise le 15 décembre 2024 à Ouanaminthe par Edxon Francisque pour The Haitian Times.

En Haïti, le point culminant de la célébration de Noël, connue sous le nom Noël en créole, c’est la veille de Noël, le 24 décembre, lorsque les familles et les amis se réunissent pour des repas de fête, des chants de Noël et des réjouissances nocturnes. Messe de minuit et “Réveillon du Nouvel AnLes repas, petits déjeuners de fête qui durent jusqu’à l’aube, marquent la soirée. Pendant ce temps, les enfants aiment jouer avec des feux d’artifice artisanaux ou siroter de l’anisette, une boisson sucrée au rhum. Le 25 décembre est une journée plus calme dédiée à la détente, à la dégustation de nourriture et à l’échange de cadeaux.

En se promenant sur la place principale de Ouanaminthe, les vendeurs annoncent les prix d’une voix chantante, leur créole portant dans les airs. Les mères tiennent de petites mains pendant qu’elles naviguent dans les rangées de vendeurs vendant des articles et des jouets artisanaux. Les artisans travaillent pour répondre à la demande d’articles de vacances, et les discothèques locales ajoutent à l’atmosphère avec de la musique et des lumières, chacune jouant un rôle dans l’effort collectif pour profiter de la joie de la saison. La célébration s’étend au-delà du commerce, l’église servant de point d’ancrage spirituel et un groupe de jeunes créant des moments de solidarité par des actes de générosité.

La lutte contre les coupures de courant est une réalité quotidienne, mais le manque d’électricité n’a pas altéré l’esprit de Noël. Malgré les coupures de courant généralisées qui touchent la plupart des villes du nord-est, les commerçants enfilent des guirlandes et accrochent des ornements colorés à leurs fenêtres, leurs magasins étant éclairés par des bougies ou des lanternes solaires. Cette lueur est vibrante, transformant les rues les plus sombres en poches de lumière.

De l’autre côté de la place de la ville, Canarie Plaza, une discothèque locale animée, les rythmes vibrants du konpa et la lueur des lumières scintillantes attirent les visiteurs et les fêtards de tous les coins de Ouanaminthe. Reconnaissant l’importance de la saison, le gérant va au-delà de ses attentes pour créer une atmosphère invitante et festive pour tous.

“Les gens viennent voir les décorations”, a déclaré Phaïka Angela Belony, responsable marketing de Canarie Plaza, un lieu de rassemblement populaire à Ouanaminthe, à proximité.

“En décorant la discothèque, nous voulions créer un espace où tout le monde peut se rencontrer et partager la joie de Noël”, explique Belony, réfléchissant à l’importance de la saison. « Nous sommes conscients que les vacances ne sont pas forcément synonymes de bonheur pour tout le monde, mais nous espérons que cette initiative permettra de répandre quelques instants de magie. »

À suivre