Une force de police multinationale déployée pour renforcer la sécurité dans l’Artibonite en Haïti

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La Police nationale d’Haïti et les forces multinationales de soutien à la sécurité (MSS) dirigées par le Kenya ont mené mardi des opérations conjointes contre un bastion du gang Kokorat San Ras aux Gonaïves. Malgré leurs efforts, aucune arrestation n’a été effectuée, mais plusieurs maisons et véhicules ont été incendiés lors des affrontements. Un policier a été blessé, selon le directeur départemental Kalerbe Exantus.

GONAÏVES — Un contingent de 100 policiers de la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS), composé majoritairement d’officiers kenyans, a été déployé dans le département de l’Artibonite en Haïti pour assister la Police nationale haïtienne (PNH) dans ses opérations contre des gangs puissants, notamment Kokorat San Ras. et Gran Grif, deux des groupes criminels les plus redoutés du département. Le déploiement, qui s’inscrit dans le cadre d’un effort plus large visant à freiner l’escalade de la violence des gangs dans le pays, a commencé mardi aux Gonaïves et à Saint-Marc.

Le nouveau directeur départemental de la PNH, Kalerbe Exantus, a confirmé que les agents kenyans du MSS ont été déployés pour renforcer les forces de sécurité locales.

« L’accent est mis sur le démantèlement des gangs Kokorat San Ras et Grand Grif qui terrorisent les familles de la région, notamment à L’Estère, Liancourt, Saint-Marc, Pont-Sondé, Petite-Rivière, La Croix Périsse, Terre- Neuve et Gros-Morne», a déclaré le nouveau directeur départemental à un groupe de journalistes locaux.

“Notre objectif est d’éradiquer ces gangs et de rétablir la paix dans la population de l’Artibonite”, a-t-il déclaré. « La police du MSS, aux côtés des unités spécialisées de la police haïtienne, rendra cela possible », a assuré Exantus, qui a remplacé Jean Louis Paul Ménard dans ce rôle après le massacre orchestré par le gang Gran Grif à Pont-Sondé le 3 octobre.

Ces opérations conjointes interviennent alors que l’Artibonite est devenue un haut lieu d’activités criminelles, avec des gangs tuant régulièrement des gens, incendiant des maisons et des fermes et extorquant des habitants et des entreprises.

En août, après que des membres de gangs du Kokorat San Ras perpétré un bain de sang dans deux localités de Gros-Morneils ont exigé des rançons aux familles, facturant jusqu’à 298 dollars par foyer pour la « protection ». Ils ont également perturbé des itinéraires de transport critiques, extorquant des chauffeurs de camion sur la route nationale n°1, une artère majeure qui relie le nord d’Haïti au reste du pays, en particulier à la capitale Port-au-Prince.

Accélération des violences des gangs dans l’Artibonite

Au cours des derniers mois, les gangs Kokorat San Ras et Gran Grif ont étendu leur emprise sur l’Artibonite, établissant des points de contrôle illégaux et semant le chaos dans des communautés autrefois paisibles. Les habitants sont terrifiés et nombre d’entre eux fuient la zone ou se conforment aux demandes d’extorsion du gang, craignant pour leur vie.

La présence des gangs a été particulièrement destructrice à Liancourt, Pont-Sondé, Terre-Neuve et Gros-Morne, où au moins 200 personnes ont été tuées lors d’une vague de violences entre juin et octobre.

Selon Exantus, l’un des objectifs de l’opération conjointe PNH-MSS est d’empêcher le gang d’occuper des points stratégiques sur la route nationale n°1 et de les déloger de leurs fiefs.

« Notre objectif est d’éradiquer ces gangs et de rétablir la paix dans la population de l’Artibonite. La police du MSS, aux côtés des unités spécialisées de la police haïtienne, rendra cela possible.

Kalerbe Exantus, Directeur Départemental de la Police Nationale d’Haïti

Le matin du premier déploiement du contingent MSS, des officiers ont effectué une descente dans un bastion de Kokorat San Ras dans le premier tronçon communal de La Croix Périsse sur la route nationale n°1. L’opération a débuté vers 4 heures du matin et visait à reprendre le territoire occupé aux mains du gang.

Malgré leurs efforts, aucune arrestation n’a été effectuée, mais plusieurs maisons et véhicules ont été incendiés lors des affrontements. Un policier a été blessé, selon le directeur départemental Exantus.

« L’opération devrait se poursuivre jusqu’à ce que l’influence du gang soit complètement éradiquée », a-t-il déclaré. « Nous ne nous arrêterons pas tant que les routes ne seront pas à nouveau sûres. »

Manifestations locales et frustration communautaire

Alors que l’opération de sécurité se déroulait, des dizaines d’habitants se sont rassemblés devant le commissariat de Toussaint Louverture aux Gonaïves, exigeant une action policière plus décisive contre les gangs. De même, les habitants de L’Estère et des environs se plaignent depuis longtemps de l’anarchie croissante qui règne dans la région, accusant les autorités de ne pas en faire assez pour les protéger.

“Nous sommes prêts à affronter nous-mêmes le gang du Kokorat San Ras si nécessaire, mais nous avons besoin du plein soutien de la police nationale”, a déclaré Jobed Jeannite, un organisateur de la manifestation. « Le peuple ne peut pas continuer à vivre sous la coupe de ces criminels. »

La région de l’Artibonite, en particulier les Gonaïves et Saint-Marc, est confrontée à des défis sécuritaires permanents. Les gangs se renforcent en raison de l’affaiblissement des forces de l’ordre et de l’instabilité économique qui sévit dans le pays. Les habitants considèrent le déploiement d’officiers du MSS comme une étape cruciale vers le rétablissement de l’ordre régional. Beaucoup restent néanmoins sceptiques, compte tenu de la force multinationale et des capacités logistiques et financières limitées de la PNH.

En raison des défis existants du MSS, les États-Unis ont proposé de le transformer en une mission des Nations Unies afin d’obtenir un financement et des ressources plus stables. Le projet a néanmoins été abandonné après que la Chine et la Russie ont menacé d’opposer leur veto à une résolution, arguant qu’il fallait accorder plus de temps au MSS pour s’établir avant d’envisager toute transformation en opération de l’ONU.

Le déploiement d’officiers kenyans dans l’Artibonite fait suite à des mesures de sécurité similaires mises en œuvre dans d’autres régions d’Haïti. Dans le cadre de la mission MSS, les officiers ont pour mission de rétablir la stabilité dans les régions les plus durement touchées par la violence des gangs, apportant ainsi un soutien indispensable à la PNH, mise à rude épreuve par la crise en cours.

Outre le Kenya, la mission MSS comprend des troupes de la Jamaïque et du Belize. D’autres pays des Caraïbes se sont engagés à fournir du personnel, mais leur participation a été retardée en raison des contraintes financières de la mission non onusienne.

El Salvador récemment a annoncé son engagement à rejoindre la missionque le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé d’un an la semaine dernière. L’objectif plus large est de contenir les gangs et de stabiliser les principaux centres urbains, permettant ainsi au gouvernement de reprendre le contrôle des infrastructures vitales, telles que les routes et les ports.

L’expertise du Salvador en matière de lutte contre la criminalité fait suite à des années de succès significatifs dans la réduction de la violence des gangs dans le pays sous l’administration du président Bukele. Autrefois considéré comme l’un des pays les plus dangereux au monde, El Salvador a atteint un taux d’homicides de 2,4 pour 100 000 habitants, ce qui en fait la nation la plus sûre d’Amérique latine, selon Radio France Internationale (RFI).

Malgré les défis, Exantus reste optimiste. « Avec le soutien de nos partenaires internationaux, nous pouvons ramener la paix dans le pays, en particulier à Port-au-Prince et dans l’Artibonite », a-t-il déclaré.

« Mais il faudra du temps et des efforts soutenus pour réellement faire une différence. »

À suivre